Une brève histoire de l’aérodynamique et des souffleries
La soufflerie aérodynamique de Paris a été construite en 1952. Il s'agit d'une soufflerie de type Prandtl, ou en d'autres termes, d’une soufflerie à circuit fermé. L'air est guidé et réinjecté en boucle dans la structure. La première a avoir été conçue de cette façon date de 1909. Elle fut créée par Ludwig Prandtl (physicien allemand) au centre de recherche aérodynamique de Göttingen.
Toutefois, les premières souffleries conçues pour des essais en aérodynamique sont plus anciennes. Les origines remontent en 1871 avec la toute première soufflerie inventée et réalisée à Greenwich (Angleterre) par Francis Herbert Wenham. La différence notable des souffleries avant celle de Prandtl, réside dans le fait que la veine était ouverte. En proposant d'avoir un circuit fermé, Prandtl invente donc un nouveau type de soufflerie permettant d'augmenter l'efficacité du moteur et d'obtenir une plus grande homogénéité de l'écoulement dans la veine d'essai.
Si initialement, la soufflerie ouverte de Wenham était simplement constituée d'une conduite de 3m de long et de section carrée de 45 cm de côté, avec un écoulement d'air créé par un moteur à vapeur entraînant une hélice, il n’en demeure pas moins que les souffleries de ce type ont considérablement été améliorées au cours du temps pour atteindre des tailles et des vitesses d'écoulement relativement importantes. Pour ce type de soufflerie, l'Histoire retiendra particulièrement celle de Gustave Eiffel construite en 1909 sur le champ de Mars à Paris. Elle était constituée d'une veine d'essais de 3 m de diamètre sur une longueur de 2,5m. L'écoulement engendré par l'hélice entraînée par un moteur de 70 chevaux-vapeur, pouvait atteindre 20 m/s. L'installation était enfermée dans un hangar de 240 m2 pour ne pas subir l'influence du vent extérieur. Outre ses dimensions, l'originalité de cette installation pour l'époque, réside dans sa conception. En effet, il s'agit d'une soufflerie aspirante, l'hélice produisant l'écoulement étant située en aval de la veine d'essais, ce qui évite la convection des perturbations des sillages des pales dans la zone d'étude.
L’ingénieur français G. Eiffel avait conçu cette soufflerie de toute pièce pour réaliser des essais aérodynamiques sur une maquette de la tour Eiffel et évaluer ainsi les contraintes subies par la structure en raison du vent. Déplacée du Champ de Mars à Auteuil en 1912, cette installation est encore en activité aujourd'hui. Pour les souffleries ouvertes, l'usage est de parler de type Eiffel.
Les souffleries sont donc de formidables infrastructures d’essais expérimentaux utilisées en aérodynamique. Cette dernière est une branche des sciences physiques, qui a pour but d'étudier les forces exercées par l’écoulement de l’air sur un corps avec une géométrie donnée. Les applications sont nombreux notamment dans le domaine de l’aéronautique, où il était simplement question: de voler.
Cette discipline a vu le jour à la fin de XIXème siècle, lorsque les premiers pionniers de l'aviation ont tenté de faire voler des corps «plus lourds que l'air». En effet, si le vol était connu depuis plus d'un siècle avec les «plus légers que l'air», c'est à dire les montgolfières ou les ballons; la première montgolfière ayant volé en 1783 à Versailles grâce aux frères français Montgolfier; il n'en n'était rien pour les corps «plus lourds que l'air». Il s'agissait d'un vrai défi scientifique pour l'époque. Le premier vol au sens strict d'un avion (appareil motorisé et non un planeur) eu lieu le 9 octobre 1890 en France, avec Clément Ader et son premier prototype baptisé: Eole (le nom venant de la divinité grecque Eole, maître et régisseur du vent). Il en fera d’autres par la suite: Zéphyr puis Aquillon. Clément Ader est d’ailleurs à l’origine du mot « avion », dérivant du mot latin avis signifiant « oiseau ».
Malheureusement, faute de vraies constatations officielles, l’exploit de Ader fut controversé. Il semblerait que l’appareil motorisé ait décollé quelques instants, avant que Ader perde le contrôle directionnel de ce dernier et sorte de piste. L’Histoire retiendra finalement plutôt les frères Wright (américains) qui réussirent en 1903 le premier vol motorisé, et contrôlé, avec l’appareil le Flyer.
De cette époque s’ensuivra plus d’un siècle de progrès et d’innovations scientifiques et technologiques en matière d’aérodynamique. Aujourd’hui, la soufflerie aérodynamique de l’école des Arts et Métiers est l’unique de ce type et de cette envergure dans Paris intramuros. Elle fêtera en 2022, ses 70 ans au service de l’innovation, de la recherche, mais également de l’enseignement, au travers des nombreux élèves ingénieurs qui auront eu le plaisir de se former sur le site.
Présentation de l’infrastructure et des moyens de métrologie
La soufflerie aérodynamique est une infrastructure appartenant à la plateforme technologique CONFLUENCE, partie intégrante du laboratoire LIFSE.
La soufflerie de l'ENSAM est du type à retour, à veine semi-guidée. La vitesse de vent allant jusqu'à 40 m/s (environ 145 km/h) peut être obtenue dans la veine d'essais. L'écoulement de l'air est d'excellente qualité, car la veine est précédée d'une chambre de tranquillisation et d’un convergent de grand rapport de contraction, valant 12,5. Le taux de turbulence y est très faible, de l'ordre de 5 millièmes.
Le ventilateur axial permettant d'amorcer l'écoulement dans le circuit, mesure 3m de diamètre. Il est alimenté par un moteur de 120 kW et controlé à l'aide d'un variateur.
La veine d'essais semi-guidée entre plancher et plafond, est de section rectangulaire (1.65 m x 1.35 m), sa longueur étant de 1,80 m. Un plateau tournant de diamètre 1,21 m permet la mise en dérapage du modèle à tester.
La veine de retour possède les dimensions 3m x 3m x 6m. Un système porte sonde 3 axes robotisé est disposé dans chaque veine afin de réaliser des explorations de la vitesse par fil chaud dans tout le volume. La soufflerie est équipée d'une installation permanente de mesure de la vitesse de référence. La pression de référence pr est mesurée grâce à l'implantation d'une prise statique pariétale dans la chambre de tranquillisation.
La soufflerie aérodynamique dispose également d’un certain nombre de moyens métrologiques de pointe pour réaliser des essais expérimentaux. Nous disposons:
- Des technologies permettant de réaliser des mesures par vélocimétrie PIV, ou encore par technique de Stéréo-PIV.
- De moyens type LDV ou Fils chauds.
- D’une Balance multi-composantes pour mesurer les efforts aérodynamiques (force et couple) dans les 3 directions, le tout piloté par ordinateur.
- De couplemètre de précision
- De capteurs de pression, de température, des tubes pitot, etc.
Si l’approche expérimentale est le coeur de notre activité à la soufflerie, il n’en demeure pas moins que les essais sont régulièrement appuyés par de la modélisation théorique ou encore des simulations numériques (type CFD par exemple) au sein du laboratoire LIFSE. Les approches complémentaires permettent d’obtenir une étude poussée, et complète, d’un système donné.
Présentation des missions de la soufflerie et des domaines d'activité
La soufflerie des Arts et Métiers est unique en son genre dans Paris. Créée en 1952, elle fêtera en 2022, 70 ans de bons et loyaux services rendus à la communauté scientifique. Elle intervient sur un large spectre d’activités, à savoir:
- Des missions d’enseignement: la soufflerie contribue à la formation d’élève-ingénieur des Arts et Métiers en matière de génie énergétique, et plus particulièrement d'aérodynamique. Au travers des collaborations entre établissement, il est fréquent de recevoir sur le site, des étudiants des universités (Sorbonne Université, Paris Diderot, ou Cergy-pontoise) et des grandes écoles (Polytechnique ou ESPCI). Un nombre important d’échange permet également d’accueillir des étudiants et des chercheurs de l’international.
- Des missions de recherche et d’innovation: la soufflerie centralise de nombreux projets de recherche académique, mais également des travaux d’expertise via des partenariats industriels. Chercheur et ingénieur, qu’ils soient universitaires ou industriels, nombreux participent à la productivité scientifique (article ou brevet) du site.
- Des missions de médiation: la soufflerie met également un point d’honneur à contribuer au rayonnement de l’établissement et de la communauté scientifique française. Il est d’usage de se prêter à des actions de vulgarisation (visite guidée, video sur les réseaux sociaux, projet TIPE de CPGE, etc.) à des fins de communication pour le grand public. Ces missions de valorisation permettent également de susciter des vocations auprès de la jeunesse.
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La soufflerie possède de nombreuses maquettes pour réaliser des essais expérimentaux. De par son histoire, il est ainsi possible d’observer des maquettes dignes de vrais objets de collection, comme par exemple: la citroën DS 19 sortie en octobre 1955. Dès ses débuts, cette voiture connait un véritable succès international, symbole de l’élégance et de l’avant-garde française! Parallèlement, il ne sera pas surprenant de trouver au sein d’un laboratoire de recherche, d’autres maquettes présageant les véhicules de demain! Comme par exemple le modèle de droite, au profil futuriste, avec une ligne singulièrement innovante afin d’optimiser les performances aérodynamiques. Ce modèle fut utilisé lors la conception d’un véhicule pour l’éco-marathon Shell.
Cette infrastructure du laboratoire a été le support d'étude et de développement de projets scientifiques et technologiques divers ces dernières années. Il convient d’en citer quelques exemple:
- La transition énergétique
La soufflerie est connue et reconnue pour ses travaux sur les éoliennes. La question de la transition écologique et énergétique est au coeur des préoccupations de tous, c’est donc naturellement que d’importantes études ont été réalisées à la soufflerie sur les systèmes énergétiques éoliens. En 2020, un nouvel axe de recherche sur la « récupération énergétique » (Energy Harvesting) a émergé.
- L’énergétique du bâtiment
L’étude de l’interaction entre le vent environnant et les bâtiments, permet d’innover en matière d’urbanisme. En collaboration avec le CSTB, un quartier de Marne-la-Vallée a par exemple été étudié à la soufflerie.
- Le transport
Ce mot est bien sûr à prendre au sens large, puisqu’il peut s’agir d’automobile, de train, mais aussi d’aéronautique: des avions, aux hélicoptères, passant par les dirigeables, jusqu’aux drones, le domaine est vaste! Pour autant, une problématique reste commune à tous ces systèmes: la question de la consommation énergétique pour se déplacer. L’étude aérodynamique est donc ici un point central.
- La physique du sport
Dans la plupart des sports, l’objectif est de gagner des secondes, voire des dixièmes de seconde: afin d’aller plus vite, pour terminer premier! Il est donc fréquent de considérer les questions aérodynamiques. La soufflerie a permis l’étude de différent système: allant d’un simple ballon de volley-ball et sa rotation, jusqu’à la conception des tout premiers rollers aérés en collaboration avec l’entreprise Decathlon.
La soufflerie poursuit encore aujourd'hui ses activités au service de la recherche scientifique et de l’innovation technologique!
Tenté par une visite virtuelle?
Nous vous proposons une petite visite virtuelle du site, accessible via le lien internet suivant:
https://www.thinglink.com/mediacard/1171576162237808641
La soufflerie vous intéresse, vous souhaitez travailler avec le laboratoire LIFSE… Alors n’hésitez plus, prenez contact avec nous!
Etudiant, ingénieur, chercheur, universitaire ou industriel, vous êtes les bienvenus! Pour venir visiter le site en réel, vous pouvez contacter:
Direction du laboratoire: sofiane.khelladi@ensam.eu
Secrétariat du laboratoire: carole.petureaux@ensam.eu
Responsable Soufflerie: michael.pereira@ensam.eu
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